SUD éducation 92 | Analyse Retraites
Toutes et tous perdant·e·s avec la réforme (sauf les riches). 
Et les fonctionnaires (de l’EN) encore plus. 

jeudi 15 décembre 2022
par  SUD Education 92

En 2019, Macron a voulu faire passer sa réforme des retraites : les personnels de la Fonction Publique se sont alors rendus compte qu’ils et elles allaient perdre plusieurs centaines d’euros par mois. 

La pandémie du COVID a changé les priorités et a paralysé la mobilisation alors vigoureuse

Pour autant, Macron n’a de cesse de poursuivre son offensive sur les retraites puisqu’en 2022, il en fait, contre vents et marées, un dossier prioritaire de son deuxième quinquennat. 

 Surtout, ne pas augmenter les traitements des fonctionnaires

Le Canard Enchaîné du 21 septembre 2022 nous l’apprend : 

« Après avoir bénéficié, au 1er juillet, d’une augmentation de 3,5% de leur point d’indice, les fonctionnaires vont affronter 5 ans de vaches maigres. 

[…] selon les experts du COR, la valeur du point enflerait (compte non tenu de l’inflation) de seulement 0.1 % par an entre 2022 et 2027 ! Les salaires privés, eux, augmenteraient de 0.4%, mais en plus de l’inflation. 

Résultat : d’ici à 2027, les fonctionnaires verraient leur traitement indiciaire (revenus hors primes) baisser de 10.7 % alors que le pouvoir d’achat des salariés du privé, lui, gagnerait 2% ». 

Qu’est-ce que le COR ? C’est le Conseil d’Orientation des Retraites [1].
Ses projections sont fondées sur des calculs qui sont alimentés par la direction du budget de Bercy, donc par les services de l’Etat. Donc par les services qui fournissent les éléments sur lesquels Macron s’appuie pour prendre ses décisions. 
Ce rapport du COR nous apprend ainsi qu’aucune autre augmentation du point d’indice n’est prévue [2]dans les années qui viennent. 
 

 L’effondrement des traitements dans l’Éducation Nationale se poursuit

Gérard Longuet, sénateur LR ( ! ), l’écrit dans son rapport sénatorial de novembre 2021

« En euros constants, les enseignants français ont perdu entre 15 et 25 % de rémunération au cours des 20 dernières années. [3] »

L’écart entre les traitements des professeurs des écoles et le SMIC se réduit toujours plus, passant de plus de 2 fois le SMIC à 1/3 [4], l’écart des autres traitements dans l’Éducation Nationale suit également une baisse constante. 
La paupérisation est grande dans les métiers les plus précaires de l’Éducation Nationale comme les AED et les AESH. 
Les calculs du gouvernement sont fondés sur ceux du COR et prévoient donc un appauvrissement encore plus généralisé des métiers de l’Éducation Nationale, de manière à contribuer à un équilibre financier des retraites : des traitements plus bas entraînent des pensions moindres. 
 

 Le serpent qui se mord la queue

Le traitement n’étant pas réévalué, ce sont mécaniquement autant de cotisations en moins pour les retraites. 
Cela renforce alors les problèmes de financement des retraites, argument qui va être utilisé jusqu’à la corde pour justifier un recul de l’âge de départ à la retraite. 
Mais les retraites ont dégagé un excédent de plus de 3 milliards d’euros en 2022, excédent qui ne serait que temporaire [5]
 

 Un vieillissement structurel des personnels de l’Éducation Nationale

 
La question des retraites concerne toute la société et de plus en plus de personnels de l’Éducation Nationale.
En effet, d’ici 2030, selon la DARES et France stratégie, c’est 329 000 personnels enseignants qu’il faudra remplacer dont 328 000 rien que pour les départs à la retraite [6]
Beaucoup d’entre nous sont donc concerné·e·s par le vieillissement et la retraite dans un horizon proche : aujourd’hui, 30 % des enseignant·e·s en activité appartiennent à la catégorie dite des seniors [7].
Les difficultés liées au vieillissement dans notre métier sont nombreuses et de plus en plus présentes pour beaucoup d’entre nous [8]
Pourtant, ces difficultés ne sont pas reconnues par notre administration : elles ne sont pas prises en compte ni accompagnées, alors même que la médecine du travail est sinistrée dans l’Éducation Nationale [9]
 

 Le financement des retraites : un choix politique 

 
Rappelons d’abord qu’il s’agit d’un choix politique : le financement des retraites peut ne pas être à l’équilibre conjoncturellement. En effet, démographiquement, le déséquilibre n’est que temporaire car liée à la vague du baby-boom [10]
Ce déséquilibre peut tout à fait être compensé par les finances publiques : l’État pourrait faire le choix de compenser le déficit des retraites. 
Mais, chaque année, l’État préfère attribuer 140 à 160 milliards d’argent public pour les aides aux entreprises privées [11]
Les gouvernements préfèrent distribuer cette manne sans contrepartie réelle plutôt que de renforcer notre système social. Ils préfèrent accabler les travailleurs et travailleuses en fin de carrière alors même qu’ils et elles ont déjà le plus grand mal à trouver un emploi. 
A l’âge de la retraite, 25% des plus pauvres sont déjà morts [12]. Cela crée un biais et contribue par ailleurs au déséquilibre politique : les retraités qui ont voté massivement pour Emmanuel Macron [13], pour le camp libéral sont donc les plus riches. 
Les voix politiques des retraité·e·s les plus pauvres, les plus précaires, les plus broyé·e·s et impacté·e·s par le système n’ont déjà (encore) plus voix au chapitre. 
Alors que les voix de celles et ceux qui en ont le plus profité - et continuent à le faire - sont sureprésentées. 
Le serpent se mord une fois de plus la queue. 
Voilà ce qu’est cette retraite soi-disant universelle que Macron veut mettre en place. 

 Une solution : la retraite unique

Depuis 2010 SUD éducation revendique une retraite unique à partir de 55 ans sans conditions d’annuités.
Pourquoi 55 ans ? Car c’est l’âge à partir duquel le taux d’emploi dévisse très largement en France plus que partout ailleurs dans des pays comparables.
Sans condition d’annuités, car la prise en compte des annuités pénalisent les personnes qui ont subi la précarité et l’absence d’emploi et qu’il s’agit d’une double peine.
Que veut dire retraite unique ? Cela veut dire que tou·te·s les retraité·e·s touchent la même pension quels qu’aient été les emplois, les salaires, les durées de cotisation. En effet, il n’y a aucune raison objective pour lesquelles les inégalités qui gangrènent le monde du travail se prolongent après la période de travail achevée. Il n’y a pas de raison qu’un salaire élevé donne droit à une retraite élevée et inversement : les plus pauvres qui ont survécu jusqu’à l’âge de la retraite devraient toucher une retraite d’un montant indigne parce qu’ils et ont pu survivre jusque-là dans la précarité ? 
Quel serait le montant de cette pension unique ? Nous pensons qu’il devrait se définir collectivement par la société dans son ensemble. Et une fois ce montant défini, viendrait la question du financement qui déterminerait le montant et les modalités de cotisation.
Nous proposons donc d’inverser la logique du débat. Non plus d’utiliser la question du financement en premier pour imposer des règles toujours plus inégalitaires. Mais au contraire que le financement soit au service d’un système de retraite véritablement égalitaire.

 Les femmes, encore plus perdantes

Dans l’Éducation Nationale, les femmes gagnent 13,6 % de moins que les hommes alors qu’elles sont 73% des personnels de l’éducation nationale.
Leurs pensions sont donc également inférieures. 

En effet, 80% des temps partiels sont occupés par des femmes. Les femmes sont surreprésentées dans les professions les moins rémunérées : par exemple, 90% des AESH sont des femmes. 
Les femmes sont moins promues te moins bien notées par la hiérarchie que les hommes. 
 
Pour toutes ces raisons, les femmes ont une pension inférieure à celle des hommes. 
Pour la retraite, au 31 décembre 2018, le montant moyen des pensions mensuelles brutes de droit direct pour les femmes était de 2 063 euros et de 2 449 euros pour les hommes.
 
De plus, elles partent à la retraite légèrement plus tôt. 

Repousser l’âge de départ à la retraite, sans politique pour réduire ces inégalités, va au contraire encore les renforcer : les femmes seront moins bien rémunérées pendant plus longtemps. 
 Les travailleuses de l’Éducation nationale subissent le sexisme de l’institution dans l’évolution de leur carrière. Elles subissent aussi les conséquences de ce sexisme au niveau de leur pension. 

Enfin rappelons un fait : si les salaires des femmes étaient rehaussés à hauteur de ceux des hommes, le surplus de cotisations que cela génèrerait rendrait les caisses de retraites excédentaires !
 

 Les revendications de SUD éducation 92

  • SUD éducation 92 dénonce une réforme des retraites qui allonge la durée du travail. 
  • SUD éducation 92 dénonce une réforme des retraites qui repose sur un appauvrissement des fonctionnaires.
  • SUD éducation 92 dénonce une réforme des retraites qui assujettit encore les plus pauvres et les plus précaires des travailleurs et des travailleuses. 
  • SUD éducation 92 appelle à mettre en place une retraite qui profite au plus grand nombre. 
  • SUD éducation 92 appelle à mettre en place une politique de médecine de prévention et du travail qui prenne en compte les difficultés dues à l’âge dans les métiers de l’Education Nationale.
  • SUD éducation 92 appelle à se mobiliser par tous les moyens contre la réforme inique des retraites.  

 Les revendications de SUD éducation

  • Pour la diminution des années de travail, avec, pour commencer, l’annulation de toutes les décotes et surcotes et le retour aux 37,5 années de cotisations pour un départ à la retraite à 60 ans sur la base de 75% du meilleur salaire, pour aller vers une pension unique à 55 ans sans condition [14].
  • Contre le projet de retraites individuelles par points mettant fin au système de retraites solidaire,
  • Pour un taux de remplacement à 75 % des dix meilleures années ou du dernier indice pour toutes et tous les pensionné-e-s,
  • Une durée de cotisation de 37 ans et demi pour le taux plein pour toutes et tous, public comme privé,
  • Pour l’intégration des régimes complémentaires dans les régimes de base en annuités,
  • Contre les pensions inférieures au SMIC,
  • Pour l’égalité entre les hommes et les femmes au travail comme dans la retraite,
  • Pour un départ à 60 ans, à 55 ans pour les métiers pénibles, à taux plein , contre le recul sur les droits acquis,
  • Pour la taxation de tous les revenus distribués dans les entreprises, y compris les dividendes,
  • Pour la prise en charge de la perte d’autonomie à 100 % par la Sécurité sociale,
  • Pour l’annulation de la décote,
  • Pour la sur-cotisation sociale patronale équivalente à celle d’un taux plein sur l’emploi à temps partiel,
  • Pour le maintien des avantages préférentiels pour les femmes tant que l’égalité des salaires et de la prise en charge des enfants n’est pas réalisée, vers la majoration des retraites du niveau des inégalités de salaires constatées,
  • Pour des emplois stables à temps complet, contre toutes les formes d’emplois précaires, suppression des exonérations de cotisations accordées au patronat.
  • Pour le maintien et l’amélioration du système par répartition,
  • Pour la suppression de tous les avantages fiscaux et sociaux pour les fonds d’épargne salariale, assurance-vie et autres fonds de pension.



Télécharger l’analyse de SUD éducation 92 en pdf.

[1Le site du COR : https://www.cor-retraites.fr/

[2Le rapport en ligne : https://www.cor-retraites.fr/sites/default/files/2022-09/RA_COR2022_0.pdf, p. 48 et suivantes. 

[4Voir en ligne sur Libération.fr, et, pour suivre le grand décrochage des traitements, voir en ligne sur le café pédagogique, sites consultés le 15 décembre 2022.

[5Voir en ligne sur lepoint.fr, consulté le 15 décembre 2022.

[6Voir le rapport en ligne, p. 7, consulté le 15 décembre 2022.

[7Chiffres en ligne depuis education.gouv.fr, p. 6.

[8Indépendamment du titre de la revue qui est révélateur de la logique à l’œuvre dans l’Education Nationale : https://www.cairn.info/revue-management-et-avenir-2014-7-page-149.htm / ou https://theconversation.com/reforme-des-retraites-le-probleme-des-fins-de-carriere-dans-leducation-nationale-128559 .

[9Selon la Cour des comptes, le ratio actuel est de 1 médecin pour environ 16 000 agent·es. Pendant longtemps, le ratio préconisé était de 1 médecin pour 2 500 agent·es. C’est la plus faible couverture en médecine du travail, secteur public et privé confondus. Voir en ligne : https://www.sudeducation.org/tracts/sante-et-securite-au-travail-letat-casse-les-thermometres/.

[10Voir en ligne : https://www.insee.fr/fr/statistiques/1521327, consulté le 15 décembre 2022

[11Voir en ligne sur Médiapart : https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/111022/160-milliards-d-aides-publiques-par-un-pognon-de-dingue-pour-les-entreprises, cela fait d’ailleurs relativiser l’assertion selon laquelle le budget de l’Éducation Nationale, avec 59 milliards d’euros en 2023, est le premier poste de dépense de l’État.

[12Voir en ligne sur Libération.fr, consulté le 15 décembre 2022.

[13Voir en ligne sur bfmtv.com ou sur Lacroix.com, sites consultés le 15 décembre 2022.


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PDF - 153.2 kio

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