Utopies du temps présent

lundi 22 avril 2013
par  SUD Education 92

Quelques réflexions sur une autre société par une militante de SUD Education

Partie 1 : Vivre le futur dans le présent : références et filiations de la critique des modes de vie

Il y a des périodes d’ébullition sociale comme Mai 68 par exemple, ces moments se situent à des croisements de deux formes de critiques :
la critique sociale (issue nous l’avons vu du bouillonnant XIXème) et ses mutations, ses tendances et une autre critique que Boltanski et Chiapello nomment artiste.

A /Définition de la critique artiste :

Pour Boltanski/Chiapello, il y a 4 sources d’indignation :

a) le capitalisme source de désenchantement et d’inauthenticité des objets, des personnes, des sentiments et, plus généralement, du genre de vie qui lui est associé

b) le capitalisme source d’oppression, en tant qu’il s’oppose à la liberté, à l’autonomie et à la créativité des êtres humains soumis, sous son empire, d’un part à la domination du marché comme force impersonnelle qui fixe les prix, désigne les hommes et les produits-services désirables et rejette les autres, d’autre part aux formes de subordination de la condition salariale (discipline d’entreprise, surveillance rapprochée par les chefs et encadrement par des règlements et des procédures)

c) le capitalisme source de misère chez les travailleurs et d’inégalités d’une ampleur inconnue dans le passé

d) le capitalisme, source d’opportunisme et d’égoïsme qui, en favorisant les seuls intérêts particuliers, se révèle destructeur des liens sociaux et des solidarités communautaires, particulièrement des solidarités minimales entre riches et pauvres.

La critique artiste s’enracine dans l’invention d’un mode de vie bohème, elle puise surtout aux deux premières sources d’indignation. Cette critique se présente comme une contestation radicale des valeurs et options de base du capitalisme, elle impose une sortie du régime du capital.

La définition est un peu réductrice, elle ne semble a priori pas englober
d’une part les critiques des modes de vie ni les militant-e-s du quotidien issu-e-s des milieux anarchistes/socialistes, dont les critiques se trouvent en même temps du côté de la critique sociale et du côté de la critique artiste
et d’autre part la critique de la modernité formulée par les milieux religieux/spirituels qui aboutissent plus souvent à une sortie du capital par un phénomène de « retour » à une société pré-capitaliste.

La critique des modes de vie capitalistes est portée à la fois par les avant-gardes artistiques, la critique anar/libertaire, et une critique issue d’une tradition hérétique et spirituelle.
Elle s’est actualisée au XXème par l’existence de micro-sociétés provisoires qui associent critique des normes sociales et des modes de production à des expérimentations sur le vécu et dans les domaines les plus quotidiens : rapports de genre, nourriture, sexualité, famille, amour, propriété, etc.

B/ les critiques artistes des années 50- 60

L’Internationale Situationniste, s’inscrivant dans les avant-gardes européennes : Dada, surréalisme, lettrisme (références : Lisptick traces, Le mouvement situationniste, une histoire intellectuelle, de Patrick Marcolini à l’Echappée, l’expo sur Debord, les œuvres de Debord, etc.)

4ème de couverture du livre de Marcolini :
« Dans les années 1960 et 1970, partout dans le monde, des révoltes éclatent contre l’emprise grandissante de la marchandise et de l’État sur tous les aspects de la vie. Les situationnistes ont contribué à forger les outils critiques de ce soulèvement généralisé, aux côtés d’intellectuels et de groupuscules influencés par le marxisme et l’anarchisme. Mais à la différence de ces derniers ils ne venaient pas tant du mouvement ouvrier que des avant-gardes artistiques du XXème siècle. Artistes en rupture de ban, mi-rebelles, mi -voyous, les situationnistes s’étaient réunis sur la base d’un programme radical : le refus des conditions de vie faites à l’homme moderne, aussi bien dans les sociétés capitalistes avancées que dans les régimes dits communistes,et la volonté d’expérimenter de nouvelles formes d’existence et de communauté en rupture avec l’ordre établi. »

extraits de Lipstick traces :
« En 1967, un an avant que les travailleurs et les étudiants français ne réactivent la Commune de Paris dans le soulèvement de Mai 68, les idées situationnistes sur la révolution étaient un non-sens manifeste. Henri Lefebvre écrivait alors des situationnistes :

« Ils ne proposent pas une utopie concrète, mais une Utopie abstraite. Se figurent-ils vraiment qu’un beau matin ou un soir décisif, les gens vont se regarder en se disant : Assez ! Assez de labeur et d’ennui ! Finissons-en ! Et qu’ils entreront dans la Fête immortelle, dans la création des situations ?

Si c’est arrivé, une fois, le 18 mars 1871 à l’aube, cette conjoncture ne se reproduira plus. »

« Dans l’immédiat après-guerre, Lefebvre était le théoricien en chef du parti communiste français, que beaucoup pensaient sur le point de prendre le pouvoir. (…) Mais durant les décennies suivantes, il se détourna du scientisme marxiste, arguant que pour changer le monde on devait d abord penser à changer la vie. Plutôt que d’examiner les institutions et les classes, les structures de production économique et de contrôle social, on devait penser à des « moments »- moments d’amour, de haine, de poésie, de frustration, d’action, de reddition, de délices, d’humiliation, de justice, de cruauté, de résignation, de surprise, de dégoût, de rancune, d’autodérision, de compassion, de furie, de paix de l’esprit - de minuscules apparitions, disait Lefebvre,dans lesquelles se révélaient les possibilités absolues et les limites temporelles de l’existence de chacun. (…) Que se passerait-il si on fondait sa propre vie sur le désir d’affirmer un moment d’amour, ou de refuser un moment de résignation ?

Des moments, disait-il, apparaissent sur un terrain mystérieux, non cartographié, qu’il appelait la vie quotidienne. C’était dans le royaume du marginal et de l’insignifiant que commençait toute critique de la réalité sociale (…)

les situationnistes écrivaient eux en 1960 : « des moments construits comme des situations peuvent être considérés comme des moments de rupture, d’accélération, de révolution dans la vie quotidienne individuelle »

Autres critiques/pratiques dans le monde

D’autre part dans le monde (occidental essentiellement, il nous manque l’ouverture vers d’autres horizons, d’autres traditions, d’autres pratiques, en Afrique, en Orient, en Amérique latine, etc.), les années 60 voient l’émergence d’une critique forte liée aux bouleversements économiques et sociaux du deuxième esprit du capitalisme d’une part, d ’autre part dune critique des modes de vie totalitaires des blocs de l’Est :

le mouvement Hippie, aux USA

les Diggers, à San Francisco

les Provos, aux Pays-Bas

les communes allemandes (Kommune 1, Kommune 2, à Berlin)

les kibbutz (qui existent depuis les années 30, en Israël)

Living Theatre (commnauté théâtrale itinérante)

Il faudrait prendre en compte aussi les mouvements blacks aux USA, ceux de la créolité ainsi que les mouvements de la renaissance indienne - American Indian Movement crée en 1968 - et certainement beaucoup d’autres, voir leur influence sur la contre-culture occidentale)

Partie 2 :les bouleversements du quotidien : la décennie 70

Ces différentes critiques, expériences se croisent, s’entremêlent et donnent lieu à : Mai 68 et après...

  • Il est un moment de presque 10 ans où les expériences dont nous venons de parler ne sont plus ultra-minoritaires. Tout d’un coup semble émerger une critique radicale de la société, non plus seulement prendre d’assaut le Palais d’Hiver mais faire imploser les lignes dures d’un monde capitaliste qui maintient - en les renforçant - les oppressions séculaires (patriarcales, patronales, coloniales) et subit l’évolution de la « modernité » qui bouleverse et atomise le corps social.

(Un camarade Burkinabé présent au stage nous a fait part des transformations actuelles dans son pays : les terres entrent dans le circuit capitaliste là où avant leur gestion était communautaire, la société est bouleversée par la gestion capitaliste qui s’appuie sur les ethnies majoritaires - les Mossi qui ont traditionnellement le pouvoir - pour mettre en place le nouveau système. Les ethnies qui fonctionnaient sur d’autres systèmes de valeurs sont prolétarisées et exclues des jeux de pouvoir.)

Les critiques mettent en lumière le concept d’aliénation dans tous les domaines de la vie et plus seulement l’exploitation économique des travailleurs et travailleuses.

Le moment 68 – ou tout du moins sa version culturelle et germano-pratine - est souvent représenté comme un théâtre de rue d’où jaillit une libération de la parole sans précédent au 20ème siècle, de celles qui précèdent les épisodes révolutionnaires. Au cœur des mots/désirs/révoltes, la volonté de bouleverser les modes de vie.

Les années 70 voient donc exploser les expériences de vivre ici et maintenant la révolution : vivre autrement, sortir du système, constituer des bases arrières, expérimenter d’autres formes de relations, de sexualité, d’éducation, voyager...

On assiste à un boum des expériences communautaires qui touchent une part non négligeable de la population et notamment des jeunes (chiffres : 500 communautés, 5000 personnes l’hiver, entre 30 et 40000 l’été)

Histoire d’un lieu : Exemple de Gourgas (mais pas exemplarité)
La maison de Félix Guattari acquise en 1967. Guattari laisse la gestion des lieux à Louis Orhant ancien ouvrier métallurgiste, ex membre du PC, alias « Mimir », avec sa femme Evelyne.

Fernand Deligny y reste quelques mois avant de créer le réseau d’accueil d’autistes à proximité de Gourgas.

Au printemps 71 à l’initiative de Marc Saracino (FA), 23 communautés se rassemblèrent à Gourgas pour créer un réseau.

En 77, Marge tient ses assises à Gourgas, squatte les lieux. Louis Orhant va alors à Saint-André de Valborgne pour poursuivre son projet communautaire.

Un lieu d’intellectuel-le-s proches de l’anti-psychiatrie, un lieu qui sert de lieu de rencontre de différents courants militants, un lieu vécu : expérience Deligny, une communauté sur place, un lieu de rencontre inter-communautaire dans les débuts du mouvement, un endroit qui se radicalise dans les années 77 : Marge et le mouvement Alternative à la psychiatrie, vente du lieu. (lire pour l’histoire du réseau Deligny : La vie de radeau, Jacques Lin)

  • La réalité des expériences communautaires est bien plus complexe que l’image d’Épinal véhiculée par la presse et la reconstruction mémorielle post-68.
  • Les typologies ne sont pas si étanches entre communautés libertaires, écolos, sexuelles, spirituelles ; de nombreuses communautés sont passées de l’une à l’autre – lorsqu’elles en ont eu le temps - avec une évolution dans le temps : la première partie des années 70 n’est pas la seconde.
  • contrairement à l’image véhiculée, les communautaires ne sont pas tou-te-s devenu-e-s publicitaires et n’ont pas tou-te-s réintégré leur classe sociale. Si le mode de vie communautaire a périclité dans les années 80 sous sa forme vécue dans les années précédentes, les « acteurs/actrices » sont resté-e-s souvent sur place, modifiant profondément les espaces vécus comme en Cévennes et en Ariège.

Il n’en reste pas moins que la décennie suivante a recouvert d’un glacis ces expériences, délégitimant les critiques qui étaient à l’origine de ces tentatives.

3ème partie : tensions et récupération

A/ tensions entre les critiques artistes et sociales

Jusqu’à aujourd’hui les deux critiques connaissent une tension quasi existentielle, qui porte la marque des oppositions théoriques initiales du XIXe et notamment entre Marx et les anarchistes.

Marx disait en parlant des banques d ’échanges et associations ouvrières, qu’elles étaient un mouvement auquel le prolétariat se laisse aller, quand « il renonce à transformer le vieux monde à l’aide des grands moyens qui lui sont propres, mais cherche tout au contraire à réaliser son affranchissement, pour ainsi dire derrière le dos de la société, de façon privée, dans les limites restreintes de ses conditions d’existence et, par conséquent, échoue nécessairement. »
Celles et ceux qui ont pour charge de changer le quotidien accusent les partisan-e-s de la critique sociale de vivre pour un grand soir qui n’aura jamais lieu et de sacrifier leur vie, le militantisme étant « le stade suprême de l’aliénation ».

Les années 70 ont vu la critique artiste prendre le pas sur la critique sociale avant que toutes deux soient emportées par la glaciation critique des années 80 et l’hégémonie de l’ultra-libéralisme. Les un-e-s et les autres s’accusant mutuellement de faire le jeu du capitalisme.

B/ récupération par le capitalisme : le nouvel esprit du capitalisme

Blanqui le disait déjà : la victoire est presque toujours détournement de valeur :

« Aujourd’hui, chaque mot signifie des choses diamétralement contraires. Lorsqu’une expression avec le sens admis, qui est celui du bien, est devenue un drapeau populaire, l’ennemi s’en empare pour le planter sur l’idée, absolument opposée et la faire accepter sans un pli. »

De fait les expériences des militant-e-s des modes de vie dans les années 70 ont été les laboratoires qui ont permis au capitalisme de se renouveler comme l’ont démontré Boltanski et Chiapello :

(Marcolini pp. 315-317) « Or, comme l’a montré B et C, la reprise en main qui s’est opérée après 1968 a consisté à dissocier la critique artiste de la critique sociale, en apaisant momentanément les revendications économiques des travailleurs (les fameux « accords de Grenelle ») et en laissant les organisations du mouvement ouvrier, traditionnellement porteuses de cette critique sociale, se décomposer à la fois sous le fait de leur propre bureaucratisation et sous les coups de la critique artiste qui leur était adressée de l’extérieur par les militants gauchistes ; dans le même temps, les exigences formulées par cette critique artiste étaient progressivement satisfaites non seulement par la mutation des rapports sociaux que nous avons déjà évoquée, mais aussi par la mise en place de nouvelles formes d’organisation du travail et par l’intensification des aspects les plus purement spectaculaires de la colonisation marchande de la vie quotidienne. (…)

Sur le plan idéologique le mouvement situationniste a été le vecteur d’un ensemble de valeurs, de concepts et de thématiques qui ont rejailli sur les transformations survenues dans l’organisation du travail au cours des dernières décennies. Quatre motifs mis en avant par les situationnistes ont été particulièrement déterminants de ce point de vue : la quête d’une autonomie individuelle et collective dans le cadre de que nous avons appelé une politique de groupes, l’apologie constante de la créativité et des possibilités infinies que recèle l’être humain ; la liberté pensée comme disponibilité au mouvement, comme nomadisme ; et enfin le remplacement du travail par un autre type d’activité, pensé sur le modèle du jeu. »

Une des conclusions tirées par Boltanski et Chiapello était la nécessité du renouveau de la critique sociale, ce qu’on a appelé les nouveaux mouvements sociaux depuis les années 90. En 2013, les nouveaux mouvements sociaux (les SUD, les contre-sommets et le mouvement altermondialiste, ATTAC, les nouveaux militants - Jeudi Noir, la BAC, etc.) ont modifié le paysage des luttes sans pour autant avoir réussi à inverser les rapports de force.

D’autres re-formulent la nécessité de ne pas opposer les deux critiques (cf. Communisme, un manifeste, éd. Nous, 2012 : « Ne pas séparer le combat du temps de vie et le combat de classe mais dépasser cette dualité »), voire de faire hybrider les différentes cultures et inventer des actions au croisement de l’art, de la militance, des modes de vie et des nouvelles théories critiques (Laboratoire d’Insurrection Imaginaire, Le Peuple qui manque, etc.).


4ème partie : Historiographie : la théorie de la dette non réglée et la tradition des vaincus de Walter Benjamin

Face aux phénomènes des résurgences de certaines pratiques (« milieux de vie »,« communautés », « collectifs », traditions radicales de critiques voire destruction – pour le Punk -) se pose la question des raisons (contingentes ou temps long, événement ou tradition ?).

Greil Marcus l’envisage sous deux angles : d’une part dans la tradition de la longue durée (Marc Bloch : « les courants de fond de la conscience collective ») il s’agirait alors de traditions occultes, parallèles, minoritaires et toujours radicales (pour les phénomènes qui nous intéressent), d’autre part il émet l’hypothèse de la dette non réglée, dette contractée dans le passé entre différents acteurs, sur le mode de l’héritage - on hérite de cette dette non réglée - de la tension - tant que la dette n’est pas réglée, elle resurgit. On hérite d’une lutte inachevée, sans cesse à recommencer mais pas de façon consciente.

Il peut s’agir aussi d’une dette à l’égard du passé et là il s’agit d’interroger la mémoire et son rôle dans le présent : du rôle de la remémoration « à l’instant du danger » comme disait Walter Benjamin.

  • « Tradition des vaincus » c’est-à-dire le sauvetage et la transmission de la mémoire des luttes (Daniel Bensaid, WB, sentinelle messianique, à la gauche du possible, Michael Löwy WB : avertissement d’incendie. Une lecture des thèses « sur le concept d’histoire »)

Daniel Bensaid sur son site (Daniel Bensaid, figure importante de la LCR est décédé il y a deux ans mais son site est toujours alimenté, il s’est penché sur les « courants chauds » du marxisme, ceux qui ont hybridé par exemple marxisme et messianisme comme Benjamin ou Martin Buber) : « Le messianisme laïque de Benjamin n’est pas la certitude passive du lendemain, mais le guet éveillé et inquiet du possible. C’est un messianisme actif. Cette disponibilité permanente à l’irruption du possible s’oppose à la tradition positiviste qui, en France notamment, a contaminé et dominé le marxisme depuis la IIe Internationale. Elle résiste à la dictature stupide des faits accomplis en accordant autant de poids et de valeur aux faits inaccomplis. Elle ne donne pas moins d’importance au sens du virtuel qu’au sens du réel.

C’est un principe de vigilance contre la confiance apaisante et somnifère dans les lois du progrès et de l’histoire qui ont coûté si cher au mouvement ouvrier. Benjamin est le témoin de cette catastrophe. Du point de vue de la vision de l’histoire commune au stalinisme et à la social-démocratie, la montée et l’avènement du nazisme ne pouvaient être perçus que comme un écart momentané, une parenthèse, ou un contretemps. Mais l’histoire reprendrait sa marche en avant… Or, pour Benjamin, il n’y a pas de détours ni de parenthèses en histoire. Chaque événement, chaque présent, pèse de tout son poids et constitue une bifurcation : impossible d’effacer l’épisode ou de rebrousser chemin. On est durablement embarqué dans une direction imprévue. C’est pourquoi il faut prendre la mesure du péril.

Pour Löwy, le lien entre le « matérialisme historique » et la théologie réside chez Benjamin dans la remémoration (Eingedenken) différente du souvenir (Andenken) qui est resté dans la dépendance étroite du vécu. Chez Péguy déjà, « l’histoire est résurrection. L’histoire passe le long de l’événement comme elle longerait un mur de cimetière. La mémoire consiste au contraire à ne pas en sortir. Elle est dans le vif. La remémoration est la quintessence de la conception théologique de l’histoire. »

La remémoration, ou le « ressouvenir », rend la mémoire active, alors que le souvenir, dit Proust, c’est « la mémoire glacée » . »

  • Ce n’est pas parce qu’une partie de la critique artiste a été récupérée par le système que nous devons ne pas faire l’histoire de ces expériences ; au contraire, il s’agit de les sauver, nous les réapproprier (y compris en s’inventant des filiations) et les transmettre, les transmettre comme histoire minoritaire, c’est-à-dire toujours active contre les systèmes majoritaires et contre l’histoire officielle.
  • Et utiliser sans vergogne les nouvelles théories critiques et les nouvelles cartographies artistiques qui modifient et inventent des rapports nouveaux aux archives, au passé, à l’histoire et ainsi à notre présent. C’est le travail d’une nouvelle génération d’historien-es et d’artistes (cf. expo qui vient d’avoir lieu organisée par Le peuple qui manque à partir d’une phrase de Monique Wittig : « Fais un effort pour te souvenir. Ou, à défaut, invente. », expo qui vise « à mettre en crise les formes normalisées du savoir et du récit historique linéaire, en disloquant les frontières artificielles entre histoire privée et collective. Il s’agit d’accumuler un vaste bagage historico-politique qui hante le présent. »

Conclusion :

Ainsi s’il y a nécessité – plus que jamais - à renouveler la critique sociale dans laquelle les syndicats ont un rôle à jouer, y compris en réinterrogeant ses pratiques dans un mouvement à la fois de retour – retour à la pensée critique du XIXème qu’elle soit marxiste ou anarchiste - et de nouvelles radicalités (reposer la lutte comme fondement du syndicalisme et vivre les potentialités des luttes), il faut aussi continuer à expérimenter du côté des modes de vie et de l’élaboration des critiques, continuer à « porter de l’huile là ou il y a du feu » comme le disait L’IS.

Bibliographie :

Lipstrick Traces, une histoire secrète du vingtième siècle, de Greil Marcus, Allia 1998, réédition Folio Gallimard

Le mouvement situationniste, une histoire intellectuelle, Patrick Marcolini, L’Echappée 2012

Le nouvel esprit du capitalisme, Luc Boltanski, Eva Chiapello, Gallimard 1999

Les milieux libres - Vivre en anarchiste à la Belle Epoque en France, Céline Beaudet, Les Editions Libertaires 2006

Des communauté libertaires de 1968 à 1978 dans le sud-ouest, Edward Sarboni, mémoire 1993

La vie de radeau, Jacques Lin, Le mot et le reste 2007

Walter Benjamin, sentinelle messianique - A la gauche du possible, Daniel Bensaid, Plon 1990, réédition Les prairies ordinaires 2010

Walter Benjamin : avertissement d’incendie. Une lecture des thèses « sur le concept d’histoire », Michael Löwy, PUF 2001

Communisme : un manifeste, Collectif pour l’intervention, Nous 2012
( http://www.editions-nous.com/collectif_communisme.html )

Sites internet :

Laboratoire d’Insurrection Imaginaire

http://labofii.wordpress.com/

Le Peuple qui manque

http://www.lepeuplequimanque.org/

Daniel Bensaid

http://danielbensaid.org/


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PDF - 111.4 kio

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