Non aux Etablissements Publics d’Enseignement Primaire !

samedi 8 mai 2010
par  SUD Education 92

« René MONORY avait tenté de créer un statut pour les directeurs d’écoles il y a vingt ans ; de multiples propositions ont été faites ; il est temps de passer à l’acte » . B. PERRUT membre de la commission.

Le serpent de mer

Depuis des décennies, les gouvernements de droite, mais aussi parfois de « gauche », rêvent de mettre en place un statut de chef d’établissement dans les écoles. Au-delà du retour du projet des « maîtres-directeurs » , ce projet contient une restructuration bien plus grave à mettre en lien avec la mise en concurrence des écoles (suppression de la carte scolaire, nouvelles évaluations de CM2/CE1). Pour autant, la mise en place des EPEP, pourrait être repoussée au même titre que la contre-réforme des lycées. La résistance multiforme (60 HEURES, RASED, postes supprimés) n’est pas étrangère aux hésitations de Darcos.

Quoi qu’il en soit, vu la constance des sinistres de l’Education dans la volonté de réorganiser l’école primaire, il est facile de parier que, sans lutte, ce projet ne sera que repoussé dans une « niche parlementaire » plus favorable.

L’idéologie de ce projet de loi est clairement explicitée dans le rapport présenté par F. REISS.

« …la partie thématique du présent avis se nourrit de la conviction du rapporteur que « l’effet chef d’établissement » sur la réussite des élèves d’une école primaire, d’un collège ou d’un lycée est une réalité. L’autorité et le rayonnement pédagogique d’un directeur d’école, d’un principal de collège ou d’un proviseur de lycée jouent pour beaucoup dans l’amélioration des résultats obtenus par un établissement et dans la qualité de la vie scolaire de celui-ci. »

Sans développer trop longuement, le rapporteur est dans la « conviction », mais à aucun moment de l’avis dans une argumentation scientifique fondée sur des recherches en sociologie de l’Education. Sans doute d’ailleurs confond-il « l’effet établissement », qui lui a été mis en évidence par des chercheurs, avec le supposé « effet chef d’établissement ».

D’ailleurs, qui peut sérieusement prétendre que l’enseignement secondaire, avec chefs d’établissements, réussit globalement mieux dans la lutte contre l’échec scolaire que l’enseignement primaire, sans chef d’établissement ?

Pour donner 2 exemples du peu de fiabilité scientifique de cet avis voici 2 citations extraites de ce rapport :

« …Il faut bien constater que l’école primaire souffre d’un manque d’esprit collectif que le directeur, qui n’a ni responsabilités ni pouvoirs réels à l’égard de ses collègues enseignants, peine à insuffler….Certes il existe un organe de concertation et de coordination pédagogique qui aurait pu faire évoluer les mentalités … Mais, en réalité, celui-ci fonctionne comme une enceinte de « négociations diplomatiques » qui tend à ralentir la mise en œuvre de solutions pédagogiques innovantes et adaptées aux difficultés constatées. A Lille, le rapporteur a rencontré un directeur d’école primaire qui lui a fait part des négociations difficiles qu’il a mené pour mettre en place les deux heures d’aide personnalisée libérées par la nouvelle organisation, effective à la rentrée 2008, des horaires de l’école primaire. Comme le conseil des maîtres n’est pas parvenu, dès le départ, à un accord sur la question, le directeur d’école, ne pouvant exercer un quelconque pouvoir d’arbitrage, a été dans l’obligation de mener une longue et patiente concertation pour faire entrer dans les faits une mesure annoncée par le ministre de l’éducation nationale. »

On constate que le député s’appuie sur une rencontre avec 1 directeur : il y a 49 928 écoles en France…Pour nous démontrer qu’il manque d’un esprit collectif dans le premier degré, il cite un exemple d’un conseil des maîtres qui comme des centaines d’autres, renâcle à appliquer servilement une mesure gouvernementale. En fait, F.REISS démontre surtout pourquoi il veut un chef d’établissement et non une organisation collective des enseignants du 1er degré : un maillon hiérarchique est plus fiable pour relayer la politique gouvernementale qu’un fonctionnement démocratique horizontal. Par ailleurs, il faudrait que ce monsieur nous démontre en quoi le secondaire fonctionne avec plus d’esprit collectif…

« …J’ai entendu de plus le témoignage d’une famille sur la charge de travail de leurs deux filles enseignantes : l’une était en RASED et avait la « belle vie », l’autre, simplement enseignante, était débordée. » Là encore, voici un député qui fonde son avis sur le travail des enseignantes en discutant avec une famille.

Si les attaques contres les collègues des RASED, et les risques encourus pour une partie des élèves en difficulté n’étaient pas si graves, ces propos pourraient nous faire rire tant ils relèvent du café de commerce.

Le cheval de Troie

Comme d’habitude, derrière le populisme scolaire « faut des chefs dans les écoles pour lutter contre l’échec scolaire », le gouvernement cache ses intentions réelles.

Les EPEP s’inscrivent totalement dans l’ensemble des projets actuels (nouvelle organisation de la semaine avec l’aide personnalisée, la sédentarisation des postes RASED, stages de rattrapage pendant les vacances), ou à venir (évaluations CM2/CE1 avec une mise en concurrence « maitrisée » entre les écoles, suppression de la carte scolaire). En fait, les EPEP seraient des petites entreprises, managées par un petit chef, en concurrence les unes avec les autres, tout en étant placées sous la double autorité de l’Education Nationale (pilote des grands objectifs) et des Municipalités (gestionnaires au quotidien).


LES EPEP, concrètement :

  • Création d’EPEP pour tout établissement de 15 classes ou plus. Soit 439 écoles en France. Un simple avis est demandé la commune. Alors qu’un accord est demandé à l’IA. Une fois le statut d’EPEP « obtenu », le nombre de classes peut repasser en dessous de 15.
  • Pour les autres écoles : sur demande de la commune (ou de l’établissement public de coopération intercommunale) : création d’EPEP via un regroupement d’écoles à partir d’un seuil de 13 classes. Là encore, une fois l’EPEP mis en place, le nombre de classes peut repasser en dessous de 13…L’EPEP ne servira pas de bouclier contre les fermetures de classes. Pire encore, les moyennes calculées le seraient sur des plus grands nombres : les ouvertures de classes seraient encore plus difficiles à obtenir et les personnels pourraient d’une année sur l’autre naviguer d’une école à l’autre en fonction des flux des élèves, sans opération de mouvement en CAPD.
  • Disparition du CONSEIL D’ECOLE : au profit d’un CONSEIL D’ADMISTRATION de 13 membres. Le directeur, 4 représentants de la commune, 3 élus représentants des enseignants, 1 élu représentant les personnels non enseignants, 4 élus représentants de parents d’élèves. Le président du CA est forcément le directeur ou un représentant de la commune. Dans le conseil d’école, numériquement le rapport de force est beaucoup plus favorable si il y a une alliance parents / instits. De plus le CA serait présidé par un fonctionnaire d’autorité. Les attributions du CA sont :

Projet d’établissement.

Règlement intérieur.

Budget et compte financier.

Recrutement de personnels non-enseignants par l’EPEP. Rôle d’employeur pour le directeur.

Conventions dont l’établissement est signataire.

Accueil information des familles, leur participation à la vie scolaire.

Rapport annuel sur le fonctionnement de l’établissement qui est présenté par le directeur et qui porte notamment sur les résultats des élèves. L’évaluation des directeurs pourrait être liée aux résultats des élèves. On imagine la chaîne de pression qui va retomber sur les personnels, les élèves et les parents.

  • Le directeur de l’EPEP rend des comptes à l’IA et au maire. Et pourrait être évalué (avec des effets sur les primes et ou les nominations ?) en fonction des résultats des élèves aux évaluations. Pilotage par la performance.
  • Le conseil des maîtres disparaît au profit d’un conseil pédagogique inspiré de celui du second degré. On passe d’une structure égalitaire composée de tous les pairs (conseil des maîtres), à une structure pilotée par un supérieur hiérarchique ayant pouvoir de décision. De plus, même si le projet de loi indique que tous les maîtres font partie de ce conseil pédagogique, la pratique de nombreux chefs d’établissements du secondaire est choisir les membres du conseil pédagogique.

Actuellement, les 2/3 des instits d’une école, peuvent imposer la tenue et le contenu de l’ordre du jour d’un conseil des maîtres. Gageons que cette possibilité démocratique n’existera plus avec le conseil pédagogique. L’ordre du jour pourra être cadenassé. D’ailleurs F.REISS s’en prend à une vision « absolutiste » de la liberté pédagogique. Certes cette notion de « liberté pédagogique » n’est pas sans poser question, mais la remettre en cause dans le cadre d’une gestion par management des décisions ministérielles, indique la volonté de l’auteur de mettre au pas les équipes.

  • C’est un agent comptable fourni par les communes. Cela facilitera le boulot du directeur. Mais, cela augmente son pouvoir et c’est aussi une forme de transfert de charge vers les communes.

Un décret du Conseil d’Etat précisera les règles d’organisation et de fonctionnement des EPEP.

Le nouveau statut de directeur d’EPEP.

Ce que dit le projet de loi :

  • Désigné par l’IA. Mouvement avec barème ou poste à profil ? Poste à profil plus cohérent avec la notion de mission et non de statut qu’avancent les partisans de ce projet.
  • Représente l’Etat au sein de l’établissement.
  • Membre de droit du CA dont il exécute les délibérations.
  • Garant du bon fonctionnement de l’EPEP.
  • Rend des comptes à l’IA et au maire.
  • En cas de difficultés graves dans le fonctionnement d’un EPEP, le directeur peut prendre toutes dispositions nécessaires pour assurer le bon fonctionnement du service public. Dans ce cas, le directeur « expose » au CA les décisions prises et « rend compte » à l’IA et au Maire. En fait il informe le CA et rend des comptes à l’IA et au Maire. Chacun voit bien où est le pouvoir…

Les arrière-pensées des députés :

Dans son rapport F. REISS déclare : « …les directeurs, à l’image de leurs homologues de l’enseignement privé et des chefs d’établissement du secondaire, doivent disposer d’un statut digne de ce nom, qui fasse d’eux les pilotes et les responsables de la politique pédagogique de l’école… ».

Il met explicitement en avant :

« Le statut des directeurs de l’enseignement catholique associé à l’Etat par contrat

Ce statut, qui date du 1er avril 2006, a été adopté par le Conseil national de l’enseignement catholique et combine des aspects de droit public, de droit privé et de droit canon. Il se caractérise par l’ampleur des pouvoirs qu’il confie aux directeurs d’école de l’enseignement catholique, appelés d’ailleurs « chefs d’établissement du premier degré ».

A sa prise de fonction, le chef d’établissement, qui est nommé par l’autorité de tutelle, soit le directeur diocésain de l’enseignement catholique, crée en son nom propre l’école, conformément à la loi de 1901 sur les associations ;

Il est, avec le président de l’organisme de gestion de l’enseignement catholique (OGEC), qui gère l’établissement, cosignataire du contrat d’association passé avec l’Etat.

Il est responsable du projet éducatif de l’établissement et de sa mise en œuvre. Suivant les termes du contrat passé avec l’Etat, il a la responsabilité de constituer son équipe éducative sur laquelle il a autorité. Il autorise notamment les candidats enseignants à entrer dans l’établissement en leur octroyant un « accord collégial » qui atteste de la volonté et la capacité du candidat à se mettre au service du projet de l’établissement ;

Il exerce l’autorité de l’employeur, par délégation du conseil d’administration de l’OGEC, sur les personnels de l’administration et de service de droit privé. Il consigne, avec le président de l’organisme de gestion, l’ensemble des contrats de travail et procède, en accord avec ce dernier, aux licenciements ;

Enfin, il propose, ordonnance et exécute le budget de l’établissement. »

Avis n° 1199 présenté le 16 octobre 2008, par le même Frédéric REISS au nom de la Commission des Affaires Culturelles, Familiales et Sociales sur le Projet de loi de Finances pour 2009 Page 30 Le pire n’étant pas certain, il y a du chemin pour le ministère à mettre en place un tel statut pour les directeurs des EPEP, mais cette référence au statut des directeurs de l’enseignement catholique nous indique le cap suivi par l’UMP.

Les laisserons-nous faire ?


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