Histoire des retraites

jeudi 13 juin 2013
par  SUD Education 92

D’ici l’été, on saura à quelle sauce le gouvernement et le Medef veulent manger ce qu’il reste du système qui permet aux salarié-e-s de ne pas mourir au travail. Les trois grands derniers mouvements sociaux en France (1995, 2003, 2010) se sont produits en réponse à des attaques brutales sur le système né en 1945. C’est dire si nous devons commencer à fourbir nos armes, car celles de nos adversaires sont déjà prêtes... et depuis longtemps !

La retraite, c’est pas si vieux !

Avant la mise en place d’un système généralisé des retraites, au milieu du XXème siècle, les anciens ne subsistaient que grâce à la solidarité familiale ou à leur épargne personnelle. C’est dire que pour les salarié-e-s pauvres, ne plus pouvoir travailler signifiait une mort rapide. En 1910, la loi sur les retraites ouvrières et paysannes prévoyait l’adhésion à des caisses de retraites pour ceux dont le salaire se situait au-dessous d’un certain plafond. Ces caisses fonctionnaient suivant le principe de la capitalisation : les cotisations versées dans un fonds géré par le patronat, devaient être rendues aux salarié-e-s sous forme de pension. Ce système, remanié lors de la mise en place des Assurances sociales en 1930, n’a pas résisté à la crise et n’a assuré des pensions dérisoires qu’à un nombre limité de salariés. C’est sous Pétain (!) en 1941, que fut décidé le versementd’une allocation aux vieux travailleurs qui nepouvaient bénéficier du régime de retraite des Assurancessociales. Tout-e salarié-e ou ancien-ne salarié-e avait droit, à 65 ans et à condition que ses revenus ne dépassent pas un certain seuil, à une allocation forfaitaire de 3 600 francs par an. C’était vraiment un minimum : avec leurs dix francs par jour, les allocataires pouvaient acheter environ trois œufs au prix légal ! Les travailleurs étrangers furent exclus du bénéfice de l’allocation nouvelle. Au lendemain de la guerre, en 1945, la Sécurité sociale prit le relais des Assurances sociales. La Sécurité sociale fut, pour les classes possédantes, le prix à payer pour la paix sociale, c’est-à-dire pour que écarter le danger des révoltes voire des révolutions.


Un système actuel loin d’être parfait

Le système mis en place en 1945 repose sur la répartition : les organismes de retraite recueillent les cotisations des actif-ve-s qui financent immédiatement les pensions payées aux retraité-e-s. Comme pour l’assurance maladie, il y a des cotisations dites salariales et d’autres dites patronales. En fait les unes et les autres, fractions de la richesse produite, sont du salaire différé. D’ailleurs les statistiques patronales ou gouvernementales les incluent toutes dans ce qu’elles appellent le « coût du travail ». Mais cette fiction a permis entre autres de justifier la présence des représentants patronaux dans les instances des organismes de protection sociale, à part égale avec ceux des salarié-e-s. Et au lieu de mettre sur pied un système qui paye automatiquement leur plein salaire aux travailleur-euse-s âgé-e-s, qui l’ont largement gagné, on a bricolé un système très compliqué et très opaque, alimenté par des cotisations diverses, dispensant des prestations diverses, selon des conditions diverses qui supportent en outre de multiples exceptions. La Caisse nationale d’assurance vieillesse (la Cnav), le régime général, a 17,8 millions de cotisants (soit 70% des actifs). Les salarié-e-s ne cotisant pas à la Cnav dépendent de plusieurs régimes « spéciaux ». Cela concerne environ 5,5 millions de fonctionnaires, mais aussi les travailleurs et travailleuses de la SNCF, d’EDF-GDF, les salarié-e-s agricoles, les mineurs, etc. Par ailleurs les agriculteurs, les artisans, commerçants, professions libérales ont aussi des caisses propres, avec leurs règles spécifiques. Toutes ces caisses, régime général, régime spéciaux, régimes de non salarié-e-s, sont cependant liées par des règles de compensation, les caisses excédentaires finançant les caisses déficitaires. Les retraites de la Sécurité sociale ayant longtemps, et souvent aujourd’hui encore, été des retraites de misère, se sont développés dès 1945 des régimes de retraite complémentaire. D’abord pour les cadres, avec l’Agirc, puis pour tous les salarié-e-s avec l’Arrco. En 1972, l’adhésion au régime complémentaire est devenue obligatoire pour tous les salarié-e-s du régime général. Aujourd’hui, un-e salarié-e dépendant du régime général cotise donc à la Cnav et à un (ou deux pour les cadres) organisme de régime complémentaire. Ces régimes complémentaires comptent pour une plus grande part dans la retraite pour les cadres et les hauts salaires, moins pour les bas. Les modalités de calculs, par points, des retraites complémentaires sont différentes de celles du régime général et pénalisent fortement les carrières irrégulières. Pour compléter le tableau, il faudrait citer les différents dispositifs de préretraites. Car l’évolution générale va vers un décalage croissant entre la fin d’activité et la prise de la pension. L’âge moyen de cessation d’activité se situe autour des 57 ans et une majorité de salarié-e-s connaît aujourd’hui une période de chômage ou de préretraite avant de faire valoir ses droits à la retraite proprement dite.

30 ans de répit... puis 30 ans d’attaques !

Ce n’est pas dès 1945 mais plutôt 30, voire 40 ans après que ce système de retraites a été en mesure de verser des retraites décentes à une part significative des salarié-e-s. En 1970, 30 % des retraité-e-s étaient encore sous le seuil de pauvreté ! C’est au cours des années 1970, que le sort des pensionnée- s s’est un peu amélioré, mais cette amélioration fut entièrement financée par les salarié-e-s eux-mêmes. En 1971, la loi Boulin porta le montant de la pension à 50 % au lieu de 40 % du salaire de référence, qui devint celui des dix meilleures années et non plus des dix dernières années. Mais le nombre de trimestres de cotisations donnant droit à une pension complète passa de 120 à 150, ce qui fit 37,5 années au lieu de 30. Aujourd’hui, un-e salarié-e peut espérer toucher une pension équivalente à 70 % de son dernier salaire net. Cette amélioration de la situation des retraité-e-s a signifié qu’une part plus importante de la richesse sociale a été consacrée aux prestations vieillesse. Mais à peine ce droit à une retraite a été reconnu dans les faits que la politique du patronat et du gouvernement a été d’y revenir par la baisse du pouvoir d’achat des retraites ou l’augmentation de la durée de cotisation qui a pour premier effet un plus faible nombre de retraites à taux plein. Dès les années 1990, les attaques contre la Sécurité sociale en général et les retraites en particulier se précipitèrent et s’intensifièrent. D’abord la politique d’exonération de cotisations sociales pour le patronat devint systématique. On parla de charges sociales qui pesaient trop lourd sur les entreprises, qui les empêchaient d’embaucher et d’investir, qui nuisaient à leur compétitivité. En fait le patronat voulait réduire à tout prix les coûts salariaux.

En 1991, le Livre Blanc publié à l’initiative du Premier ministre socialiste Michel Rocard donne le ton d’une nouvelle vague de « réformes »... en fait d’attaques ininterrompues depuis !

1993 : Balladur s’attaque au régime général des salarié-e-s, avec l’allongement de la durée de cotisation nécessaire pour liquider sa retraite à taux plein, de 37,5 ans à 40 ans, l’augmentation du nombre d’années de référence pour le calcul du salaire annuel moyen, sur lequel est calculée la pension de retraite : on passera désormais, progressivement, aux 25 meilleures années, au lieu des 10 meilleures années. La réévaluation des pensions et des années de salaire passées se fera désormais sur la base de l’évolution des prix, et non plus sur celle des salaires.

En 1995, Juppé essaie d’étendre l’allongement de la durée de cotisation de 37,5 à 40 ans aux
salariés de la fonction publique, mais il devra reculer devant l’ampleur du mouvement social.

2003 : la réforme Fillon aligne la durée de cotisation nécessaire pour les fonctionnaires sur
celle des salarié-e-s du privé (40 ans), et crée les conditions d’un accroissement futur de cette durée, à 41 ans en 2012.

2007-2008 : la réforme des régimes spéciaux aligne la durée de cotisation sur celle du privé et du public (41 ans en 2016), instaure un mécanisme de surcote/décote et indexe les pensions indexée sur les prix et non plus sur les salaires.

2010 : pour les salarié-e-s du secteur privé, les agriculteurs-trices, les travailleurs et travailleuses non salarié-e-s, les fonctionnaires, l’âge minimum requis pour liquider sa retraite passe de 60 à 62 ans ; l’âge requis pour percevoir sa retraite à taux plein sans remplir les conditions de durée de cotisation est élevé de 65 à 67 ans. La loi prévoit également un allongement de la durée légale de cotisation (41 ans pour les personnes nées en 1952) et on devrait parvenir à 41 ans et demi d’ici 2020. Pour les agents des régimes spéciaux et de la fonction publique, les âges de départ et du taux plein sont relevés de deux ans, suivant le même calendrier que pour le régime général.


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