Billet d’humeur sur l’enseignement laïque de la morale ou enseignement d’une morale laïque

jeudi 2 mai 2013
par  SUD Education 92

1) C’est une vieille marotte de nos ministres de l’éducation, si bien que Peillon reprend ici une vieille lubie que l’on retrouvait déjà chez Chatel et Darcos. Comprenons bien : il ne s’agit pas seulement de cours d’instruction civique qui, quoique l’on puisse par ailleurs en penser sont effectivement susceptibles d’instruire les élèves (ne serait-ce que sur le fonctionnement des institutions). Or la morale ne relève pas de l’instruction tout simplement parce qu’elle ne relève pas d’un savoir, mais de valeurs. La morale ne me dit pas ce qui est, mais ce qui doit-être, ce pourquoi ainsi que ne le peut l’ignorer notre ministre philosophe, elle ne peut se fonder que sur la foi, même s’il peut s’agir d’une foi, disons « rationnelle » ainsi que le pensait par exemple Kant.

2) Tout ça pour dire que je ne sais pas, par conséquent, ce que peut être une morale laïque. Une religion peut enseigner une morale puisque pour elle les valeurs relèvent d’un savoir révélé, un laïc ne le peut pas. Il peut par contre enseigner l’exercice de la raison libre, du jugement critique, bref tout ce qui peut permettre de poser et d’offrir à la discussion des valeurs. C’est en ce sens par exemple que même Kant pouvait dire que « l’on n’apprend pas la philosophie, mais que l’on apprend à philosopher ». C’est aussi sur cette base que Spinoza pouvait exiger dans son traité Théologico-politique de distinguer entre la foi et sa morale qui n’exigent que l’obéissance et la philosophie qui est en chacun l’exercice libre de sa raison.

Notre héritage, si nous devons en avoir un, est celui-là et non pas une quelconque morale républicaine qui a aussi bien su condamner le capitaine Dreyfus que voter les pleins pouvoirs à Pétain.

3) Enfin, comment oublier que la référence à une morale laïque, et plus particulièrement au fameux impératif catégorique de Kant ( « Agis seulement d’après la maxime grâce à laquelle tu peux vouloir en même temps qu’elle devienne une loi universelle »), est ce qui a permis à Vincent Peillon de justifier son refus de lever les sanctions prises à l’encontre des enseignants « désobéisseurs ». Il ajoutait même qu’il s’agissait là d’une simple question de « bon sens », lequel étant supposé naturellement bien partagé (Descartes) n’a donc pas besoin d’être enseigné, ainsi que doit le savoir notre ministre philosophe.

Cela en dit assez long, en réalité, sur la confusion entretenue entre question morale et question politique. L’enseignement laïque de la morale ( ou, comme on voudra, d’une morale laïque) devra-t-il enseigner que la désobéissance est, universellement et inconditionnellement, une faute ou même un crime ?

Si l’on en croit H. Arendt, c’est bien de ce type de morale dont se prévalait Eichmann.

P., SUD Education 92


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