Austérité : ceux qui en souffrent et ceux qui en profitent

jeudi 10 janvier 2013
par  SUD Education 92

Le texte qui suit est un extrait de la Lettre n°8 de l’Association Pour une École Démocratique, de décembre 2012 -
www.ecoledemocratique.org

Il ne fait plus de doute, désormais, que le secteur européen de l’éducation sera l’une des
grandes victimes de la crise financière et budgétaire.

En Grèce, les salaires des professeurs ont chuté
de plus de 30%, tombant sous la barre des 1.000
euros nets par mois en fin de carrière. En Espagne,
le 19 octobre, des dizaines de milliers de
professeurs, de parents et d’étudiants sont
descendus dans les rues pour dénoncer 1 milliard
d’euros d’économies dans l’éducation. À Rome
aussi, des milliers de manifestants ont défilé le 10
novembre contre les coupes dans l’éducation : 157
millions d’euros d’économies en 2013, 172 millions
en 2014 et 237 millions en 2015. En République
tchèque, un plan annoncé le 6 novembre dernier
prévoit une saignée drastique de la recherche
scientifique et une réduction des salaires des
enseignants. En Irlande, 2.000 professeurs ont
manifesté à Dublin à l’appel des trois principaux
syndicats. Ils dénonçaient une réduction du budget
de l’éducation de 77 millions d’euros, qui allait
toucher particulièrement les enseignants
fraîchement diplômés. Sur l’ensemble de leur
carrière, ceux-ci vont perdre quelque 250.000 euros
par rapport à leurs aînés. En Angleterre, le
gouvernement libéral vient d’annoncer la
suppression de 1.000 emplois dans les services du
département de l’éducation (DfE), soit un quart de
l’emploi total. Six bureaux régionaux du DfE vont
fermer leurs portes. Plus près de nous, le
gouvernement flamand a annoncé que
l’enseignement allait devoir assumer 82 des 100
millions d’économies prévues dans la fonction
publique. Cela représente 500 euros par membre du
personnel. Les syndicats ont obtenu que la
modération (diminution du pécule de vacances) soit
limitée à 2014 et 2015, mais le prochain
gouvernement flamand décidera si ce pécule sera
rétabli au niveau actuel (92% du salaire mensuel
brut) à partir de 2016. Et, tout comme en
Communauté française, les subsides de
fonctionnement ne seront pas indexés.

Cette récente avalanche d’annonces de mesures
d’austérité s’inscrit dans un mouvement de plus long
terme qui touche toute l’Europe. Selon un rapport
rendu public par la Commission en octobre, un
grand nombre de pays de l’Union ont mis en place
des réductions ou des gels des salaires des
enseignants depuis 2010.

Même l’OCDE soulignait déjà en 2008 la
diminution constante des moyens disponibles pour
l’éducation. Cependant, comme on pouvait s’y
attendre de la part du grand centre de réflexion du
capitalisme mondial, c’était pour conclure que la
solution ne résidait pas dans une augmentation des
budgets mais bien dans l’ « optimisation des choix
politiques » et l’ « amélioration de la gestion ».
Traduction : l’OCDE veut recentrer encore
davantage les programmes sur les besoins de
l’économie (plus de compétences utiles sur le
marché du travail, moins de savoirs généraux) et
déléguer le plus possible d’activités vers le secteur
privé.

Ce dernier ne manque d’ailleurs pas de profiter
du définancement de l’enseignement public. Une
étude publiée par le professeur Mark Bray en 2011,
a montré l’extraordinaire développement des
« systèmes d’éducation parallèles ». Ce rapport
indique que le secteur de l’éducation parallèle en
France représentait 2,2 milliards d’euros en 2007 et
augmentait d’environ 10 % par an. En Allemagne,
entre 900 millions et 1,5 milliard d’euros sont
dépensés chaque année pour des cours particuliers.
La plupart de ces cours concerneraient du soutien
scolaire pour les élèves du secondaire. En France et
en Belgique, les tarifs peuvent grimper jusqu’à plus
de 30 euros de l’heure. Même en Scandinavie, où le
système scolaire est souvent considéré comme l’un
des meilleurs, les cours de soutien rencontrent de
plus en plus de succès.

En France, en Belgique, en Grande-Bretagne, en
Irlande et ailleurs, des entreprises spécialisées dans
les cours particuliers à domicile se sont développées
(Educadomo, Acadomia,...). Celles-ci raflent un
marché de plusieurs milliards d’euros. Mais elles
contribuent ainsi, dit Mark Bray, à « exacerber les
inégalités : les familles avec des revenus plus
importants peuvent se permettre des cours de
meilleure qualité et plus fréquents ».
Lorsque l’Aped dénonçait, dès la fin des
années 90, les menaces de marchandisation
de l’éducation qui découlaient de la crise
mondiale de l’économie capitaliste, certains
nous accusaient de noircir un peu trop le
tableau, voire de tomber dans la « théorie du
complot ». Force est, aujourd’hui, de
constater que nos pronostics étaient
malheureusement encore en dessous de la
réalité. Plus que jamais, la défense d’une
école démocratique et émancipatrice devra
s’inscrire dans un combat beaucoup plus
large, contre la domination que le capital et
ses détenteurs exercent sur tous les aspects
de la vie des gens.


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