Protection fonctionnelle : mode d’emploi

lundi 7 mars 2022
par  SUD Education 92

Les fonctionnaires (ancien-ne-s fonctionnaires et agent-e-s non titulaires de droit public - AED, AESH) bénéficient, à l’occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d’une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie : mode d’emploi de la protection fonctionnelle.

 Bénéficiaires :

Le terme d’agent-e public recouvre l’ensemble des fonctionnaires ou ancien-ne-s fonctionnaires (Conseil d’État, 26/07/2011, n°336114), mais aussi les agent-e-s non titulaires de droit public (assistant-e-s d’éducation, AESH, contractuel-le-s).

La protection fonctionnelle s’applique aussi aux agent·e·s en congé de maladie (Conseil d’État, 12/03/2010, n°308974), grévistes (Conseil d’État, 22/05/2017, n°396453).

De par la jurisprudence, cette notion tend à s’étendre à divers contrats de droit privé au titre de la participation à l’exécution d’une mission de service public, et même à des collaborateur-rice-.s occasionnel-le-s du service public dans certains cas.

 Conditions de mise en œuvre :

Les atteintes donnant lieu à la protection de l’agent-e doivent affecter celui/celle‐ci.

Les mesure prises au titre de la protection fonctionnelle s’inscrivent dans trois temps :

  1. La protection fonctionnelle a priori  : L’administration doit chercher à « prévenir » les atteintes causées notamment à l’intégrité physique de l’agent. (Article L134-6 : « Lorsqu’elle est informée, par quelque moyen que ce soit, de l’existence d’un risque manifeste d’atteinte grave à l’intégrité physique de l’agent public, la collectivité publique prend, sans délai et à titre conservatoire, les mesures d’urgence de nature à faire cesser ce risque et à prévenir la réalisation ou l’aggravation des dommages directement causés par ces faits. ». L’administration doit prendre « des actions de prévention » afin de prévenir - lorsqu’ils sont évitables - la réalisation des risques professionnels (atteintes à l’intégrité physique, violence, harcèlement, menaces, injures, diffamation, outrages, etc.).
  2. La Protection fonctionnelle concomitante à l’atteinte portée : l’administration est tenue de « protéger » et d’assister l’agent·e public pendant toute la durée de l’atteinte.
  3. La Protection fonctionnelle a posteriori L’administration se doit de « réparer » le préjudice éventuellement causé à l’agent·e du fait de l’atteinte subie.

Globalement, sont visés directement des infractions et délits pénalement répréhensibles. Les atteintes à la personne peuvent être physiques (violence...), morales (diffamation) ou matérielles (dommages aux véhicules ou aux biens...).

Elles doivent également être en rapport avec l’exercice des fonctions de l’agent-e, ce qui exclut les atteintes relevant de la vie privée et de cas fortuits.

La protection fonctionnelle peut -voire doit – revêtir un caractère humain : dans le cadre de cette protection fonctionnelle, des mesures comme la prise en charge médicale de l’agent·e, l’organisation d’un entretien par le directeur général des services assisté d’un·e psychologue pour permettre à l’agent·e de s’exprimer sont à envisager (CAA Marseille 23 décembre 2014, n° 13MA03535).

 Cas essentiels de mise en œuvre :

 NB : plainte de l’administration à la place de l’agent·e victime

Lorsque l’agent·e n’a pas engagé d’action devant les juridictions pénales, l’administration peut, sans y être tenue, déposer plainte afin de déclencher l’action publique (CAA Paris, 10 décembre 2013, n°11PA03266).
L’administration est par contre tenue de porter plainte lorsqu’elle a connaissance de « menaces ou de violences ou de commettre tout autre acte d’intimidation à l’égard de toute personne participant à l’exécution d’une mission de service public, afin d’obtenir pour soi-même ou pour autrui une exemption totale ou partielle ou une application différenciée des règles qui régissent le fonctionnement dudit service. » (Article 433-3-1 du code pénal créé par la loi du 25 août 2021).


 1. Être poursuivi-e devant une juridiction de l’ordre judiciaire (civile ou pénale)

Si les faits se rattachent à l’exercice de ses fonctions et à condition qu’aucune faute personnelle détachable de l’exercice de ses fonctions ne lui soit imputable, l’État est tenu de prendre en charge les frais d’avocat engagés pour la défense de l’agent-e concerné-e.
La protection commence dès la garde à vue (TA Orléans, 27 novembre 2001 n°99-2107 et n°99-3081).
Le cas échéant, l’État est amené à prendre en charge les condamnations civiles prononcées contre l’agent-e.


 2. Faire l’objet de menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages

S’il peut être établi un lien de cause à effet entre l’agression subie et les fonctions exercées, l’État est dans l’obligation de prendre toute mesure de nature à faire cesser les troubles subis.
Dans l’éventualité où l’agent-e engagerait pour ces raisons une procédure juridictionnelle (civile ou pénale) contre ses agresseurs, l’administration peut être amenée à s’associer à la plainte déposée par l’agent-e et à prendre en charge les frais de justice lui incombant, y compris les frais d’avocat.


 3. Être victime de dommages matériels commis sur ses biens (véhicules...)

L’État intervient alors en complément de l’indemnisation proposée par sa compagnie d’assurances. La Circulaire 97-136 du 30 mai 1997 a mis en place une procédure simplifiée qui permet au/à la fonctionnaire client-e des compagnies d’assurance, signataires d’une convention passée avec le ministère de l’éducation nationale, de bénéficier de sa subrogation (transmission des créances) pour l’intégralité des frais de réparation sans qu’il n’ait besoin d’en faire l’avance.


 4. Autorisation d’absence

Pour les cas précédents, la Direction générale de l’administration et de la fonction publique recommande à l’administration d’accorder des autorisations d’absence, rendues nécessaires par la procédure, afin de se rendre aux convocations des services de police ou de gendarmerie, de la commission d’admission des requêtes ou de l’autorité judiciaire, aux audiences de la juridiction judiciaire, ainsi qu’en vue d’assister aux entretiens avec sont défenseur et aux réunions de travail organisées par l’administration. (Ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, Direction générale de l’administration et de la fonction publique, Circulaire FP n° 2158, 5 mai 2008, relative à la protection fonctionnelle des agents publics de l’Etat, p. 8)


 5. Répondre publiquement aux atteintes publiques

Lorsque les atteintes portées aux agent·e·s revêtent un caractère public, la réponse apportée par l’administration afin de faire cesser les atteintes peut - voire doit - être systématiquement publique.
L’administration ne peut pas assister passivement mais doit manifester publiquement son opinion par exemple en témoignant lors de l’instance engagée par le fonctionnaire victime contre les auteurs (Conseil d’Etat, 14 février 1975, n°87730, publié au recueil Lebon), en prenant position dans un droit de réponse dans la presse au profit d’un·e fonctionnaire victime de diffamation par voie de presse (Conseil d’État, 24/07/2019, n°430253).


 6. Dossier administratif et protection fonctionnelle

La protection fonctionnelle peut aussi se traduire par le retrait du dossier administratif de l’agent·e de documents comme des rapports d’inspection ou des témoignages qui ont un caractère injurieux ou diffamatoire.

Si des documents mettent en cause un·e agent·e sans déboucher sur une infraction pénale ni sur une procédure disciplinaire, alors les accusations qui y sont portées revêtent un caractère diffamatoire et l’administration est tenue de les retirer du dossier administratif au titre de la protection fonctionnelle. (CAA de Nancy, 10 novembre 2004, 99NC02449).


 Procédure :

L’agent-e victime de préjudices liés à l’exercice de ses fonctions doit en tout premier lieu les signaler à son/sa supérieur-e hiérarchique.

Il ou elle doit produire :

Un courrier sollicitant la mise en œuvre de la protection statutaire adressé à la rectrice, sous couvert du responsable hiérarchique ;
Un rapport circonstancié comportant un avis sur le lien de causalité entre les dommages subis et les fonctions exercées ;
Pour les cas de dommages sur les biens des agent-e-s :
Le texte du dépôt de plainte auprès des autorités de police judiciaire.
Une copie de la carte grise dans le cas d’un véhicule endommagé.

Dans le cas d’une plainte, une demande de protection doit être réalisée.
En cas d’appel, il faut faire une nouvelle demande.
En cas d’appel en cassation, il faut faire une nouvelle demande.

 Modèle de demande :

Le rectorat de Versailles a mis en place un formulaire à remplir. Les chef·fe·s doivent viser le document sauf si la demande est dirigée vers eux·elles.

.
Ce formulaire dûment complété doit être adressé à l’attention de la Rectrice de l’académie de Versailles soit par courrier postal (Rectorat de l’académie de Versailles, service DACES 1, 3 bvd de Lesseps, 78017 Versailles Cedex ; soit par courriel à ce.daces1@ac-versailles.fr)

Joindre un maximum de pièces qui tendent à montrer :
1. la matérialité de l’agression ou l’objet de la demande.
2. le lien avec la fonction.
Donner tous les éléments et témoignages en votre possession.

 Demande via COLIBRIS

Le lien COLIBRIS : [1]https://demarches.demarches.ac-vers...

La circulaire du 31/08/2022 :

circulaire pf colibris 2022
annexe1 circulaire pf colibris 2022
annexe2 circulaire pf colibris 2022
annexe3 circulaire pf colibris 2022

 Délais :

Aucun texte n’impose de délai pour demander la protection.

En cas de refus, l’administration doit informer l’agent par écrit. Elle doit préciser à l’agent les motifs de son refus et lui indiquer les voies et délais de recours.

L’absence de réponse dans un délai de 2 mois suivant la réception de la demande vaut décision implicite de refus.

La protection fonctionnelle accordée à un agent constitue une décision créatrice de droits. Ainsi, la protection fonctionnelle ne peut pas être rétroactivement retirée plus de 4 mois après sa signature, même si l’existence d’une faute personnelle de l’agent est révélée. Cependant, le retrait est possible si la protection fonctionnelle a été obtenue par fraude.

En revanche, la protection fonctionnelle peut être abrogée si l’existence d’une faute personnelle de l’agent est révélée ou si les faits invoqués à l’appui de la demande de protection ne sont pas établis.

 Sur ARENA

https://ariane.ac-versailles.fr/pia/jcms/s2_6332116/fr/protection-des-personnels

 Les guides institutionnels

kit protection fonctionnelle vf 2021 02 05 09 17 15 753

flyer protection fonctionnelle agents 5

2019 guide agression 1er degre 1168321

2019 guide agression 1er degre 1168321

2019 guide plainte 1168581

 Les références réglementaires :

 Ressources :

  • Marie Cochereau, « La Protection fonctionnelle », Actualité juridique. Fonctions publiques — AJFP, avril 2023, p. 192 - 195,

[2

Les fonctionnaires bénéficient, à l’occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d’une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire.

Lorsqu’un fonctionnaire a été poursuivi par un tiers pour faute de service et que le conflit d’attribution n’a pas été élevé, la collectivité publique doit, dans la mesure où une faute personnelle détachable de l’exercice de ses fonctions n’est pas imputable à ce fonctionnaire, le couvrir des condamnations civiles prononcées contre lui.

La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l’occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté.

La collectivité publique est tenue d’accorder sa protection au fonctionnaire ou à l’ancien fonctionnaire dans le cas où il fait l’objet de poursuites pénales à l’occasion de faits qui n’ont pas le caractère d’une faute personnelle.

La collectivité publique est subrogée aux droits de la victime pour obtenir des auteurs des menaces ou attaques la restitution des sommes versées au fonctionnaire intéressé. Elle dispose, en outre, aux mêmes fins, d’une action directe qu’elle peut exercer au besoin par voie de constitution de partie civile devant la juridiction pénale. Les dispositions du présent article sont applicables aux agents publics non titulaires.


Documents joints

2019 guide agression 2nd degre 1168323
OpenDocument Text - 18.6 kio

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