PPCR : on peut refuser !

vendredi 6 octobre 2023
par  SUD Education 92

PPCR : POURQUOI ET COMMENT RESISTER ?

Depuis la mise en application de l’arrêté du 5 mai 2017, les enseignant‧e‧s du premier et du second degré subissent désormais leurs « rendez-vous de carrière ». Ces nouvelles modalités d’évaluation des enseignant‧e‧s sont la déclinaison dans l’éducation nationale du PPCR, “Parcours professionnels, carrières et rémunération”. Précisons que l’Union syndicale Solidaires (à laquelle appartient SUD Éducation) avait dès le départ dénoncé cette réforme et voté contre en septembre 2015, à l’inverse notamment de la FSU, de l’UNSA et de la CFDT, qui ont voté pour. Les modalités d’évaluation nous prouvent que nous avions raison.

Le déroulement du « rendez-vous » de carrière :

Au début de l’été vous recevez un mail sur votre boîte professionnelle, vous informant que vous êtes éligible dans le cadre du PPCR, au « rendez-vous » de carrière. Ces rendez-vous auront lieu à 4 moments différents :

> Premier rendez-vous : passage de l’échelon 6 à l’échelon 7

> Second rendez-vous : passage de l’échelon 8 à l’échelon 9

> Troisième rendez-vous : au moment du passage à la hors-classe

Enfin un quatrième rendez-vous, qui ne donnera pas lieu à une évaluation permettra, à 10 % des collègues d’accéder à une « classe exceptionnelle » nouvellement créée.

Chacun de ces moments d’évaluation se déroulera de la même façon :

Le rendez-vous de carrière doit être annoncé quinze jours (vacances scolaires incluses) à l’avance à l’agent‧e. Il se compose d’une inspection suivie d’un entretien avec l’IEN de circonscription, dans le premier degré, ou l’IPR, dans le second degré. Celui-ci ou celle-ci évalue à partir d’une grille nationale établie sur la base du référentiel de compétence de 2013 et comportant 11 items aux intitulés plus ou moins vagues. Dans le second degré, ils sont remplis par la chef‧fe d’établissement ainsi que l’IPR et, dans le premier degré, par l’IEN. Pour chacun de ces items, il est attribué un niveau de maîtrise, parmi 4 possibilités, allant de la mention «  à consolider  », en passant par «  satisfaisant  » et «  très satisfaisant  » à celle d’« excellent  ». Le tout sera regroupé dans un compte-rendu d’évaluation qui comportera une appréciation littérale de 10 lignes de la part de l’IPR et la chef‧fe (seconde degré) ou l’IEN (premier degré). Ce compte-rendu d’évaluation sera communiqué à l’agent‑e via son adresse mail professionnelle en fin d’année scolaire. A ce stade, l’agent‑e dispose de quinze jours pour indiquer qu’il ou elle a pris connaissance du compte-rendu et formuler des observations. A la rentrée suivante, entre le 15 septembre et le 15 octobre selon votre situation, l’appréciation finale du rendez-vous de carrière est délivrée par le Dasen (premier degré), le Recteur (pour les certifié‧e‧s) ou le ministre (agrégé‧e‧s) et communiquée à l’agent‧e. C’est à partir de cet instant que peut être engagée la procédure de recours.

En fonction des résultats de votre évaluation, vous pourrez bénéficier d’un avancement accéléré à l’échelon suivant (7 ou 9) un an avant les autres… mais dans la limite des places disponibles  ! En effet seulement 30 % des personnels évalués pourront prétendre à bénéficier de cette mesure. Les 70 % restants avanceront au même rythme.

LE POINT DE VUE DE SUD :

  • L’évaluation sous la forme d’une inspection que nous avons connue jusque là n’était déjà pas satisfaisante à nos yeux. Mais désormais s’y ajoute une démarche d’auto-évaluation à travers le “document de référence de l’entretien” qu’il est conseillé de remplir en amont. Ce document n’est pas anodin puisqu’il y est question de compétences très générales avec des aspects comportementaux et relationnels, laissant libre cours à une appréciation très personnelle selon les IEN ou les IPR. Chaque inspecteur‧rice a sa propre vision de l’enseignement et de la pédagogie qui peut être différente de la nôtre, sans compter que les avis peuvent être divergents entre elleux. Or, les inspecteurs‧rices n’enseignent même plus et ont parfois enseigné le minimum requis pour passer les concours.
  • L’évaluation par un‧e inspecteur‧rice ne remplace pas la formation continue des enseignant‧e‧s qui est quasiment absente actuellement. Ce sont les enseignants‧es qui doivent s’informer sur les formations disponibles et s’y inscrire selon leurs besoins. A partir de la rentrée 2024, les formations doivent se dérouler en dehors du temps scolaire, ce qui va accroître davantage le manque de formation des enseignants‧es.
  • SUD éducation revendique des temps de collaboration entre pair-es, sur le temps de travail, plutôt que des visites d’inspection descendantes et génératrices de mal-être.
  • Il faut bien «  choisir  » les plus «  méritant‧e‧s  ». Le critère décisif n’est pas le nombre d’items excellents dans son champ professionnel, il se situe au-delà de l’enseignement stricto sensu : être formateur‧ice, faire de l’animation de bassin, référent‧e ou d’autres tâches que d’enseigner devant ses élèves.
    C’est un moyen de pousser les personnes à faire des tâches annexes, chronophages et lourdes sans décharge de service ni indemnités.
  • On peut s’attendre à ce que les femmes soient à nouveau pénalisées, puisqu’elles prennent plus de congés parentaux et s’occupent davantage des tâches domestiques et d’éducation des enfants. La classe exceptionnelle renforce donc les inégalités salariales entre les hommes et les femmes. Alors que (dans le premier degré surtout) les femmes sont sur-représentées dans l’enseignement, lorsqu’il s’agit de la classe exceptionnelle cette féminisation disparaît.
  • Enfin, dans le second degré, il s’agit d’un pouvoir accru confié aux chef‧fe‑s d’établissements, sur l’avancement de carrière et les pratiques professionnelles. Ils et elles évaluent désormais des compétences aux contours flous mais qui s’immiscent sournoisement dans la sphère pédagogique. Auparavant, à travers la note administrative, le chef d’établissement évaluait majoritairement des aspects plutôt «  objectifs  » comme l’assiduité ou la ponctualité. Aujourd’hui celui-ci ou celle-ci va pouvoir évaluer si les enseignant‧e‧s sont capables de «  travailler en équipe  », d’« installer et de maintenir un climat propice aux apprentissages  » ou encore s’ils contribuent à «  l’action de la communauté éducative  ». À cela devra s’ajouter la co-évaluation de 3 autres items avec l’inspecteur. La conséquence était attendue : nombreux sont les chef‧fe‑s à abuser de leurs nouveaux kits de petits managers pour imposer leurs vues sur les pratiques pédagogiques et professionnelles et diviser les équipes enseignantes.

Contester son appréciation finale :

Lors de la réception de votre compte-rendu de RDV de carrière en fin d’année scolaire il est possible de formuler des observations. Nous vous invitons à le faire si nécessaire. A partir de la réception de l’appréciation finale, entre le 15 septembre et le 15 octobre selon votre situation, il est possible de faire un recours. SUD éducation se tient à la disposition des collègues qui souhaiteraient contester leur appréciation finale.

1) En cas de désaccord il faut, dans un premier temps, formuler un recours gracieux par écrit en vue de demander la révision de l’appréciation finale du DASEN (pour le premier degré), du recteur (pour le second degré), ou du ministre (pour les agrégés). Ce recours doit être transmis par voie hiérarchique dans un délai de 30 jours francs suivant la notification de l’appréciation finale du rendez-vous de carrière. L’autorité hiérarchique compétente dispose de 30 jours francs pour répondre.

2) En cas de réponse défavorable, ou d’absence de réponse à expiration du délai de 30 jours francs, il est possible dans un second temps de saisir la CAPD (premier degré) ou la CAPA (second degré). Cette requête doit être transmise par écrit, par voie hiérarchique, dans un délai de 30 jours francs. Toute requête doit être argumentée : contestation de la régularité de la procédure, avis illogiques ou contradictoires, non prise en compte de certaines activités ou missions, mention d’activités syndicales, mention d’absences pour raison médicale, anciennes notations et rapports d’inspection…

N’hésitez pas à contacter SUD éducation afin d’être accompagné‑e dans cette démarche.

Peut-on refuser le rendez-vous de carrière ?

Il est possible de refuser cette évaluation : aucun texte ne nous oblige à l’accepter. Le refus d’inspection est d’ailleurs reconnu par la circulaire du ministre de l’éducation Alain Savary publiée au BO du 20 décembre 1983. Certes, on choisit de n’avancer qu’à l’ancienneté mais accepter le rendez-vous de carrière ne permettra qu’à 30% d’entre nous d’avancer plus vite, même si le rapport est bon !

Seuls quelques documents peuvent vous être demandés. Dans le premier degré, il s’agit du registre d’appel renseigné et complété, de l’emploi du temps de la classe affiché ainsi que des livrets scolaires. Dans le second degré, il faut présenter le cahier de texte (électronique ou non), les bulletins et le cahier d’appel (électronique ou non). Pour signaler son refus, il suffit de faire un courrier à l’inspection, par voie hiérarchique (voir exemple de courrier ci-dessous) et/ou en recommandé avec accusé de réception et/ou par mail pour garder des traces.

En principe, l’administration pourrait prendre des mesures de rétorsion même si celles-ci ne sont pas systématiques. Les sanctions peuvent être un rappel à l’ordre écrit, une convocation à un entretien hiérarchique accompagné d’un‑e représentant‑e syndical‑e pour un «  recadrage  », une baisse de la note pédagogique et/ou administrative, ou encore un blâme (expurgé obligatoirement au bout de 3 ans du dossier administratif). Dans beaucoup de cas, les collègues ayant refusé l’inspection n’ont comme seule sanction que d’avancer à l’ancienneté. De plus, chaque sanction peut être contestée. Quoiqu’il en soit, il est clair que plus nous serons en capacité de construire un rapport de force et de solidarité avec les collègues en refus d’inspection, moins l’administration sera encline à sanctionner.

Nous rappelons que le refus d’inspection s’inscrit dans dans un combat plus large, de refuser l’évaluation, de s’opposer aux chef‧fe‧s de service, de marquer notre opposition au poids grandissant des chefs d’établissement.

Avant d’entreprendre cette démarche, nous vous conseillons de vous rapprocher de notre syndicat pour bénéficier de conseils, appréhender les différentes situations qui peuvent se poser et pour connaître vos droits. Il est nécessaire de ne pas rester isolé‧e‧s face à la hiérarchie.

Modèle de lettre de refus

Modèle de refus PPCR argumenté


Modèle de refus PPCR simple

ppcr_comment_resister

Jusqu’ici, tout ceux et toute celles qui ont refusé on simplement continué à avancer à l’ancienneté comme la grande majorité des collègues.

Sud Education 92 soutient les collègues refusant les rendez-vous de carrière : contactez-nous !

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