On ne peut pas défendre l’École contre le fascisme sans combattre le capitalisme !

mardi 16 décembre 2014
par  SUD Education 92

On ne peut pas défendre l’École contre le fascisme sans combattre le capitalisme !

La gangrène se répand

Des « manifs pour tous » aux résultats des dernières élections, les réactionnaires et les extrémistes de droite de toutes sortes gagnent du terrain. L’École n’est pas épargnée. En témoignent la montée récente du SNALC aux élections professionnelles, la création du collectif Racine (« les enseignants patriotes »), ou encore les JRE (Journées de Retrait de l’École) contre une soi-disant « théorie du genre », qui se sont propagées rapidement et ont parfois surpris par leur ampleur des collègues démuni-e-s. Et les attaques réactionnaires contre l’École ne font que commencer. Forts de leur réussite, les activistes des JRE ont fondé la FAPEC (Fédération Autonome de Parents Engagés et Courageux), parmi ses objectifs : formations en histoire aux lycéens (France des Rois avec des personnages décisifs comme Clovis, Saint Louis ou Jeanne d’Arc), aider les adolescents à se défendre de cette période qui les entraîne vers un abîme intellectuel et un abîme concernant leur identité sexuelle, lutter contre le nouvel ordre mondial, contre la « théorie du genre », donner une alternative à l’Ecole de la République qui veut séparer l’enfant de Dieu, encourager de plus en plus de parents à choisir soit l’instruction à domicile soit les écoles hors contrat, restaurer la France chrétienne dont nous avons besoin ...
Ces idées véhiculées par des partis et des réseaux de plus en plus organisés et séducteurs s’invitent dans de nombreux foyers. Internet est devenu un vecteur puissant de leur propagation et les médias de masse, à la recherche de sensationnel, ouvrent grande leur porte au Front National et consorts. L’avancée des idées d’extrême droite, racistes, néo-nazies, n’est pas un accident marginal ni un « défaut » de la république, mais un fruit de la crise sociale. La politique actuelle leur ouvre un boulevard. Les travailleurs/euses qui se sentent trahis par un gouvernement « de gauche » qui diminue les droits sociaux, fait des cadeaux au patronat, mate les mouvements sociaux, expulse les camps de Roms... faute d’autre alternative, peuvent tomber dans les pièges d’un discours faussement social ou extrémiste religieux.

L’École de la république, au service du capitalisme, est le terreau des violences sociales

Face à ces menaces, la résistance doit s’organiser tant à l’École que dans la société toute entière. Pour SUD éducation, il est illusoire de croire que l’École de la République constitue un rempart contre ces idées nauséabondes. Au contraire, depuis sa création, les valeurs qu’elle promeut constitue le terreau de tous les sectarismes et de la violence sociale. La méritocratie et l’élitisme républicain conduisent les jeunes à penser qu’il y a dans la société les méritants et les autres, et légitiment l’exclusion de ces derniers, ainsi que la constitution d’une élite dont la société aurait besoin. Ces concepts sont à la base d’un système éducatif très inégalitaire. Contrairement aux idées reçues, l’ « Ecole de Jules Ferry1 », édifiée sur l’écrasement de la Commune de Paris en 1871, n’a pas été mise en place pour le bien du peuple, mais pour servir les besoins du capitalisme montant de la fin du XIXe siècle : former des ouvriers sachant lire, écrire et compter. Ces apprentissages fondamentaux s’inscrivaient d’emblée dans le cadre d’un formatage disciplinaire et idéologique visant la soumission aux classes dominantes et à leur Etat, dans le but d’éviter une nouvelle « Commune » et de former des soldats prêts à récupérer l’Alsace et la Lorraine. Si les orientations plus humanistes d’après-guerre ont donné une place plus importante aux valeurs d’épanouissement et de « citoyenneté » en allongeant le parcours scolaire du plus grand nombre, ce compromis laisse progressivement la place aux valeurs purement capitalistes de compétitivité, de concurrence ou encore d’employabilité. L’École devient alors un lieu de sélection et de formation de futurs salariés, les moins performants ou les plus récalcitrants n’ayant pour horizon que chômage et précarité.


Nos propositions

SUD éducation n’a jamais déconnecté les problèmes de l’École de ceux de la société, c’est pourquoi nous défendons le projet d’ « une autre École pour une autre société ». Les valeurs éducatives de cette École sont la solidarité, l’émancipation, l’épanouissement et la coopération. Les moyens pour les concrétiser sont un même enseignement polytechnique pour tous2 de la maternelle au lycée. Mais ce projet n’a de sens que dans le cadre d’une transformation de la société, imprégnée elle aussi de ces valeurs.

Sud Éducation considère que le devoir du personnel d’éducation consiste à tout faire pour armer de savoir la jeunesse, ouvrir les esprits contre cette société en décomposition avancée, déconstruire le discours de ceux qui la dominent encore et de ceux qui voudraient la dominer. Le personnel d’éducation ne peut rester neutre face au fascisme montant, face aux tentatives pour asservir les parents et la jeunesse des quartiers populaires avant tout autres car ce sont eux les plus discriminés, les plus rejetés, eux pour qui l’École de la république n’est qu’un lieu de sélection, d’élimination, de racisme qui les amène parfois à commettre des actes extrêmes comme la destruction par l’incendie des écoles, gymnases, bibliothèques... Une telle neutralité apolitique transformerait en un couteau sans manche, tous les efforts d’enseignement et d’éducation libérateurs. Face aux agressions contre le savoir et les élèves, qu’elles viennent du pouvoir ou de l’extrême ou ultra-droite, notre syndicat ne se replie pas sur l’école de Jules Ferry, il refuse d’asservir l’éducation aux besoins du capitalisme présent ou passé. Il comprend que les meilleures des pédagogies ou dévouements seuls ne suffiront pas pour convaincre nos élèves les plus défavorisés, ceux qui en ont le plus besoin, de l’utilité du savoir.

C’est pourquoi SUD éducation dénonce l’imposture sociale des divers mouvements d’extrême droite qui ne s’attaque pas aux véritables causes de la fracture sociale que sont la compétition permanente et la concurrence entre les travailleurs, mais qui l’exacerbe en y ajoutant la compétition entre les identités (hommes/femmes, français/immigrés, chrétiens/musulmans, blancs/noirs, hétérosexuels/homosexuels, …), mais que nous dénonçons aussi les « républicains » des gouvernements successifs qui prétendent représenter le peuple et la démocratie en répétant qu’il n’y a pas d’alternative (« TINA »3) à la politique libérale et en bafouant les votes quand le résultat leur déplait4. Ce mépris de la classe dominante, que constitue les capitalistes et les gouvernements qui les servent, nourrit le ressentiment et la colère qui, mal analysés peuvent être utilisés par les courants sectaires et fascisants. C’est pourquoi nous affirmons qu’on ne peut défendre l’École (et la société toute entière) contre le fascisme sans combattre le capitalisme.

SUD éducation s’engage donc à :

continuer la lutte pour obtenir la titularisation de tous les travailleurs de l’Éducation sans conditions, notamment de nationalité ;

revendiquer la mixité des personnels enseignant-e-s et non-enseignant-e-s de la maternelle à l’université ;

continuer à défendre les élèves sans-papiers ;

soutenir les luttes sociales contre l’offensive capitaliste qui conduit notamment à la dégradation de notre protection sociale et de l’ensemble des services publics ;

d’élaborer, avec toutes les organisations qui le voudront, des analyses sur tous les mouvements d’extrême droite (JRE, FAPEC, FN, Soral, Dieudonné, …) ;

développer des réflexions et initiatives dans la bataille contre ces mouvements ;
contribuer à la solidarité internationale avec les peuples opprimés

Depuis sa fondation, SUD éducation s’inscrit dans la lutte contre le racisme, le fascisme, le sexisme, l’homophobie et les réactions de tous genres. Cette lutte n’est donc pas nouvelle pour nous, mais dans le contexte actuel, elle doit être réaffirmée comme prioritaire, se donner des armes adaptées et se renforcer au plus vite.

SUD Education 92

1 Jules Ferry, présenté comme l’instigateur principal de l’école obligatoire, gratuite et laïque, qui a en fait été initié sous la Convention de 1793 (loi du 5 nivôse an II) et repris par la Commune de Paris de 1871. Ce que le mythe oublie souvent c’est qu’il a oeuvré pour que la mission principale de l’école soit l’enseignement de la morale et qu’il était un fervent défenseur de l’expansion coloniale.

2 Voir les textes de congrès définissant plus précisément le projet d’Ecole de SUD éducation.

3 TINA : « There Is No Alternative » doctrine thatchérienne signifiant que le capitalisme, le marché et la mondialisation sont nécessaires et bénéfiques et que toute organisation sociale qui prend une autre voie court à l’échec.

4 En 2005, le Traité Constitutionnel Européen a été rejeté par référendum en France (ainsi qu’aux Pays Bas et en Irlande), malgré une campagne médiatique intense en sa faveur. Trois ans plus tard, le gouvernement français ratifiait le Traité de Lisbonne, quasiment identique … sans référendum.


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